mardi 3 septembre 2019

Masturbation et troubles psychiques

Les troubles psychiques comme substituts à la masturbation

Je remercie Wilhelm Reich pour l’initiative qu’il a prise d'établir la relation entre des tics musculaires (qui correspondent à une attitude caractérielle) et l’interdit de la masturbation : bien qu’il l’ai prononcée sous cet avers, je la remets à l’endroit. Son étude se passait dans le cadre de la psychanalyse qui était déjà à l’époque un scandale sexuel (vers 1921) et je suis sûr que mes tardives conclusions auraient apparu à un autre que moi, plus tôt, en suivant un cheminement similaire et moins prude.

Le tic comme substitut à la masturbation : il s’agit d’un papier de Wilhelm Reich, paru en langue française dans une compilation : Premiers écrits 1 ou 2 chez Payot, en 2006. Si j’ai bonne mémoire, il s’agissait d’une grand-mère qui avait des tics aux visage et l’auteur a résolu le problème en restituant à la personne la possibilité libre de se masturber.

La masturbation est un interdit très puissant, qui est effectif dès le plus jeune âge. Ou parfois, elle est permise jusqu’à la puberté, mais dès que le plaisir émanant des organes aphrodisiaques devient véritablement transique (qui met en transe), envahissant, orgastique, « on » y assoit un holà terrifiant.

L’interdit consiste donc, mes chères amies, à ne pas vous masturber, c’est-à-dire à vous éviter d'approcher la transe sexuelle et son paroxysme, l’orgasme, par vos propres moyens, vos propres sensations dont vous aimez le crescendo, l’acmé et la détente consécutive. Ces plaisirs « solitaires » ne sont finalement destinés qu’à reconnaître votre pouvoir à partager une jouissance avec autrui.

Ainsi, c’est précisément cet interdit de la masturbation qui est l’origine de quasiment toutes les malaises psychiques, c’est-à-dire, le contraire de la relation saine à autrui… ce qu’on appelle pudiquement, les maladies mentales qui ne sont que des maladies affectives (la sexualité est une expression affective de la vie, sans doute la plus intense dans son aspect éphémère), en ceci qu’elles résultent des défenses contre les plaisirs issus de la masturbation.

Ok, qu’en est-il de la schizophrénie, de l’autisme, qui sont des maladies plus profondément (dit-on) physiques ? Oui, vous avez raison… c’est pour cette raison que je ne vais m’intéresser qu’aux psychoses, qu’aux névroses, et borderlines, paranoïas, etc., des « maladies » où l’affectivité du sujet a dû adopter des positions qui séparent d’autrui (bien évidemment, contre son gré, puisque nous sommes des animaux sociaux, grégaires) et qui provoquera le conflit-même de la maladie, sa structure affective gravement altérée.

L’interdit de la masturbation revient à saborder en soi le plaisir par soi. La punition est double : c’est SOI qui s’interdit DU plaisir issu de SOI et de l’attente du plaisir orgastique. Il y aura donc, un apprentissage et son acquis au refus de la transe, un apprentissage induit par l'éducateur d’être parcouru par quelque chose qui émane pourtant de vous et qui vous envahit : vous devez, à vos dépens, apprendre cela : rejeter le plaisir ! Cet apprentissage ne peut rester sans conséquences qui se manifesteront, suivant la caractère de la personne, selon des particularités et des modalités, des « maladies mentales », des adaptations opportunes dans la cadre d'un environnement malade.

Ainsi, les « maladies mentales » ne sont-elles que des manifestations de cette mutilation de la sensation pré-orgastique résultant de rapports sociaux et affectifs débilitants. Et on ira très souvent, comme avertissement terrifiant, jusqu'à mutiler les organes aphrodisiaques mâle et femelle.

Bon… les malades affectifs, ceux qui se sont vu – hélas – contraints de ne pas pouvoir se masturber (c’est-à-dire, je me répète : obtenir par soi du plaisir pour soi) sous peine de graves, non anodines, vexantes, dégradantes, douloureuses souffrances à eux infligées, vont immédiatement ne voir qu’un monde de masturbation, en tout lieu, en tous temps, se réalisant dans une grande diversité de manières. N’est-ce pas ce qui se passe aujourd’hui, en matière et en manière de substituts à la masturbation ?

Il y a quelques années, j’avais entamé de faire une relation entre le mode du refus du plaisir et une disposition mentale défensive acquise, une structure caractérielle. Je ne disais pas à l’époque que l’origine du désordre est la rupture de la personne avec sa possibilité de se donner du plaisir grave – car il ne s’agit pas de superficiel, on l’aura compris.

Très généralement, cette disposition n’a pas rendu les gens méchants… il demeure toujours, pour les plus malicieux, les plus obstinés et les plus discrets, une ouverture vers cette satisfaction, quelque part. C’est pour cette raison qu’ils restent la plupart du temps avenants, sincèrement et fortement conscients des altérations qui les empêchent d'être meilleurs partageux. Quand on sait se masturber, on n’a pas envie, lors d’une rencontre, de se retrouver soi, mais bien de rencontrer autrui, et l’attention qu’on s’est apporté ici, se reporte alors là pour un mélange plus profond, fusionnel – puisqu’on ne craint pas la profondeur dont on se sait, soi, apte d’atteindre.

Ici, je ne décris (à la louche) que des traits de caractères qui nuisent finalement, lors de ce moment singulier où il regimbe au plaisir, à l'expression de cette gentillesse et qui résulte de cette structure caractérielle :
- le paranoïde a peur d'être dépassé par le plaisir, car le plaisir c'est trop fort pour lui ;
- le masochiste a peur d'être submergé par le plaisir parce que le plaisir noie et il risque de suffoquer ou de le faire éclater ;
- le schizoïde (hors de sa structure plus élémentaire due à un manque immédiat après la naissance d’un contact profondément bienveillant et aimant avec les yeux de sa mère ou plus tard lors de l’allaitement) la peur que le plaisir lui échappe parce que le plaisir lui ferait perdre l'équilibre qu'il a construit pour le parer, et que le plaisir est unificateur ;
- l'oral anticipe la peur de n'avoir pas assez de plaisir parce que le plaisir lui échappe sans fin, chez lui, le plaisir est insaisissable ;
- le phalico-narcissique a peur de ne pas dominer le plaisir, car chez lui, le plaisir est dégradant, car l’accès au plaisir demande de l'humilité ;
- le rigide a peur que le plaisir lui fasse mal parce que, quand il respire, le plaisir passe difficilement les côtes et soulève des souffrances, et c'est trop dur à supporter ;
- le psychotique a peur de ne pas pouvoir anticiper le plaisir, car l’acmé du plaisir surprend et c'est insoutenable.

Et, pour rejoindre une vieille analyse que j’avais entreprise sur la relation entre les structures caractérielles et la Société du Spectacle :
- le producteur : anal : plaisir retenu, parcimonieux ;
- le réalisateur : phalico-narcissique : plaisir exhibitionniste ou dirigiste ;
- l'acteur : le masochiste : plaisir apeuré ou craintif ;
- le spectateur : oral : plaisir glouton ou insatiable.

De plus s’ajoute la manière dont les gens n'accomplissent pas entièrement une action, une tâche, la manière de l'imperfection (ou les beugues nucléaires, informatiques, d’attention, politiques, médicaux, etc.), si je puis dire, car il ne faut pas qu'ils accomplissent complètement ce qu'ils font ou ont à faire : cela créerait une angoisse et cette angoisse est en relation avec la structure caractérielle, à l’approche de l’orgasme, de la transe orgastique.
- l'un ne va pas commencer, il procrastine ;
- l'autre s'arrête en plein milieu de son ouvrage ;
- un troisième va s'arrêter juste avant sa fin ;
- le dernier ne va pas peaufiner pour rendre meilleur.
À ceci près que la vie marchande, la vie de la marchandise, par son salariat et assimilés, oblige chacun à produire quelque chose (l’obligation au travail que cette indigence de la critique fait accepter comme évidente) et j’aurai encore pu montrer que des groupes de métiers correspondent précisément à ces dispositions de sauvegarde face au plaisir, du fait d’avoir été obligé d’en réchapper par l’interdit de la masturbation, par l’interdit de se toucher en vue de se faire et de se procurer du plaisir. Car la mesure de l’approche de ce plaisir donne celle des capacités qu’on a de faire aboutir les choses et pareillement de l’utilité de leur intérêts en tant que disposition anti-grégaires (un slogan de mai 68 écrit sur les murs de la Sorbonne, disait : L’humanité ne sera heureuse que le jour où le dernier capitaliste sera pendu avec les tripes du dernier bureaucrate, ou l’inverse !).

Sans octroyer plus de sûreté, chacun de ces rôles est pourtant adopté, non seulement en vue de se ressentir soi comme structure rassurante, mais aussi pour se rassurer de sa propre présence par rapport à son milieu. Cette incertitude qui excite les nerfs, nous conduirait, incidemment, à une brève étude des modes de malveillance et de son intensité. La personne maltraitée voudra toujours compenser cette maltraitance qu’est l’interdit de la masturbation (la nostalgie du bonheur) par une vengeance, imaginaire ou plus ou moins réelle, mais jamais aboutie, toujours dans la répétition, une vengeance réitérative, de la malveillance. Le pire est que le maltraité ou la maltraitée maltraitera, et ainsi de suite, de génération en génération : seules les conditions d’existence peuvent changer « l’utilité » de cette vengeance et donc en amoindrir les effets, l’intensité qui atténuera son efficacité, c’est-à-dire l’intensité de l’interdit. La multitude des diverses modalités et des moyens me dispense d’aborder en détail cette malveillance. Je vais en rester là ici.

Quand Wilhelm Reich affirmait que les tics musculaires d’une grand-mère sont des substituts à la masturbation, je poursuis en affirmant que, dans notre socialité patriarcale, l’interdit universel de la masturbation est la source d’une immense majorité des malaises sociaux, des maladies mentales… qui permettent, assurent, pérennisent (hélas) la reproduction de cette société patriarcale (le capitalisme assis sur la plus-value cache derrière son petit doigt le patriarcat en mouvement). La masturbation est d’abord un abord de son propre corps sous le seul aspect du plaisir qu’il est apte à (se) donner et une approche sans crainte (ni souffrance) de son intensité et du débordement de ce plaisir. Elle est un préliminaire dans le temps historique de la personne à la rencontre d’autrui (ce à quoi chaque spécificité sexuelle est destinée : la rencontre, le partage et l’identification comme union, et la communion). Elle est corrélativement un discriminant du vrai et du faux : quand on sait, on ne se la laisse pas jouer : si la vie prête à rire de plaisir, c’est du sérieux !

jeudi 22 août 2019

Sensation et bonheur

Sincèrement, avec tous ses tracas particuliers, la vie vaut le coup d’être vécue, mais pas dans ce monde humain de merde.

La sensation de vivre est *extraordinaire* et c’est amusant parce qu’elle est sa propre source : la vie *est* la sensation. Qui s’y intéresse ? Quasiment tous les animaux et insectes, etc. sont centrés sur cette auto-sensation : ils ne perçoivent la sensation que parce qu’ils la vivent, c’est évident. Nous ? Serait-ce suffisant de dire que nous percevons sentir ? Je ne sais...

En fait, le « bonheur » fait parti intégrante de l’existence, puisqu’il ressemble si fortement à cette sensation de vivre... et donc, à la satisfaction à la fois de vivre et de sentir, tout simplement. Ce « bonheur » doit être universel... sauf chez l’humain qui en fait une tarte à la crème.

La sensation est aussi bien la satisfaction de sentir que la sensation elle-même... à moins de douleur... encore qu’on *sent* encore et toujours. La mort est la fin de toute sensation par l’organisme vivant. Et la sensation n’est pas que de nerf ! elle est surtout d’émotion d’humeur, de liquide, de fluide. La spécificité de la mort donne une réellement bonne approche de la sensation, par absente *totale* : ainsi je peux dire que la sensation est la vie, sa présence, et sa reconnaissance.

Il est possible que c’est à cause de cette duplicité de la sensation qui se sent elle-même, qu’a octroyé la « réflexion » des anthropoïdes, mais à tel point de développer un néocortex... ça je ne sais pas (encore). Dans quelle mesure la sensation aurait-elle eu besoin d’un tel développement dans sa reconnaissance qu’elle invente les anthropoïdes ? On peut surtout poser la question à l’envers : quelle est cette puissance dans sa perception que la sensation chez l’humain en arrive à l’effrayer ? Surtout les sensations aphrodisiaques, issues des organes aphrodisiaques (qu’ils nomment génitaux, pour s’en séparer davantage) : le rejet de la plénitude de ces sensations spécifiques a débordé sur l’ensemble de l’existence humaine jusqu’à la pourrir à la moelle et pourrir le monde dans lequel il vit, jusqu’à la moelle, aussi bien.... sans vouloir le reconnaitre ! ... c’est-à-dire : le sentir, le ressentir...

Sans l’éclat de la lumière de la sensation, rien n’est possible. Et pourtant, nous avons tous les outils pour sentir, plus ou moins asthéniés, plutôt. Un sens engourdi ne sent pas comme un sens vif, attentif, aimant, accueillant, curieux. Au surplus, il y a une anesthésie de la sensation dans la répétition et le sens ad hoc qui consiste précisément à rafraîchir cette anesthésie, en arrive à s’oublier pour rafraîchir cette sensation : l’asthénie du *sens de la répétition* est sans doute le plus grave avatar de l’humain qui dénonce qu’il a sombré dans la résignation.

La sensation s’apparente au mystère de la poésie : quelque chose se passe, qui vous emporte quelque part, en un lieu à l’image magique, imagique. Le poète sait transmettre ce quelque chose, le lecteur aux sens éveillés la perce-voit et en jouit. La poésie est une tension qui se détend d’elle-même dans la beauté, non pas seulement de ce qu’elle décrit (et écrit) mais du ressenti qu’elle provoque... et cela mène à une détente de cette tension qu’elle a su susciter en vous. La poésie est une transe, avec sa tension, sa charge, sa décharge et sa détente éphémères.

Mais à l’évocation de cette transe particulière qu’est l’orgasme – cet accès finalement à la détente sexuée – cette détente et sa sensation effraient l’humain (lorsqu’il parle de détente, il n’en a pas accès à la demie, et certains n’en connaissent à peine que le dixième). Néanmoins, pour l’avoir affirmé à l’instant, hors la poésie, la plus grande détente est procurée par l’orgasme... et l’humain a peur de l’orgasme (lorsqu’il parle d’orgasme, il n’en a pas accès à la demie, et certains n’en connaissent à peine que le dixième). La sensation de la détente issu de cette transe (allez savoir pourquoi... on le sait depuis la découverte de la cuirasse caractérielle de Wilhelm Reich, totalement ignorée) est prohibée, vilipendée, torturée, écrasée, souvent détruite par des alarmes stupides et dérisoires destinées à prétexter donner mesure à cet interdit étrange.

Allez savoir pourquoi l’humain reproche à autrui d’être plus détendu que lui, de sorte à le stresser et qu’il le devienne au moins comme lui...? Je donnerai des exemples plus tard qui se pratiquent dès le plus jeune âge ! Et c’est *toujours* le plus stressé qui veut stresser autrui. C’est un fait mal accepté par chacun de nous, mais l’individualisme empêche toute action collective contre cette calamité sociale, affective et sexuelle... et que pourrions-nous faire pour y palier ? Car il s’agit d’une structure (une construction de caractère) de la personnalité du stressé, structure acquise comme protection à un pire, je veux dire, l’adoption d’une attitude du moins pire d’une personne placée face au pire. Et ce « moins pire » est l’assise du stress, ou son équivalent : l’absence de détente satisfaisante. Il semble évident que le stressé hait la détente, non ?

L’anti-poésie, c’est le stress. Le stressé ressent bien son stress, il en perçoit parfaitement la sensation comme étrange (à moins d’un insensibilisation prégnante), mais il ne sait quoi faire, quoi en faire... il est dans l’impossibilité de faire quelque chose contre cette tension continuelle, de sorte à obtenir une détente. C’est qu’il y a placardé une morale qui justifie cette « impossibilité », cette incapacité. Cette morale ôte les moyens ordinaires à la personne de pouvoir prétendre à la détente... et cette morale est partie intégrante de cette structure ! L’exemple le plus criant est d’avoir nommé le nerf qui irrigue les organes aphrodisiaques, le nerf « honteux », le nerf pudendal, alors qu’il est une source de cette transe orgastique que j’évoquais plus haut, même de manière solitaire. C’est la raison pour laquelle j’ai renommé ce nerf, le nerf *aphrodisiaque*.

Le stressé recherche le conflit – une forme active de séparation vis-à-vis d’autrui – comme source de détente ; cependant, sans rechercher concomitamment une réelle solution au conflit, car la permanence du conflit est pour lui une source de moindre stress : en orientant vers autrui sa tension, il la perçoive comme extérieur à lui et s’illusionne s’en défaire. C’est ainsi que le stressé est persuadé que ses organes aphrodisiaques sont absolument cloisonnés à sa seule et unique personne, alors qu’ils sont destinés au partage.

La sensation (le fait de ressentir) lui est une torture, car elle demande son identification, son acceptation et parfois même son acmé. Il confond la provenance de la sensation : de lui ? d’autrui ? et cette indistinction est une grave source de confusion intellectuelle, affective, sociale.

Le stressé ne sait pas respirer sans contrainte – cela lui donne une sensation de fondre qu’il craint comme la noyade ou la chute libre – et faute de pouvoir expirer sans contrainte, la transe orgastique – avec son crescendo d’*emprise de la sensation issue des organes aphrodisiaques sur la conscience* – lui coupe le souffle... il étouffe... il tousse, et il cherche à l’étouffer partout autour de lui. Il ira jusqu’à se créer du pouvoir sur autrui, toujours par la malveillance ou la perversité (faire passer le mal pour du bien), afin de s’assurer que ce crescendo n’aura jamais lieu, sinon que sous une forme pseudonyme, pseudo-orgastique, comme exutoire.

Le stressé, bien malgré lui, vit dans la continuelle *incertitude d’une détente*. Ainsi, quand le stressé parle de « liberté », il reste vague, sinon qu’une insidieuse forme de prison semblable à cet étouffement respiratoire, à cette incertitude de la détente, qui le saisissent dès qu’une émotion devient trop forte : il veut retrouver cette barrière chez chacun de nous, car chez autrui, la liberté lui est intolérable. Quand l’occasion se présente à lui de se secouer du carcan qu’on lui a imposé, il reproduira la même structure sociale, car c’est celle où il trouvera le plus de rassurance. En transition entre ces deux organisations sensiblement identiques, il y aura un flottement, où règnera un désordre qui fera office de moment de liberté où l’emprise qu’il aura sur le fait social n’e pourra pas avoir cours, au soulagement d’autrui. Mais, ce moment est de courte durée : la femme rentrera vite dans les rangs de la hiérarchie, les enfants n’auront qu’à peine goûté aux possibilités que leur offre leur grégarité native (entre-aide, coparticipation, collaboration, empathie et capacité de comprendre des difficultés, pouvoir du dialogue, etc.), et les chefs, un instant égarés, reprendront leurs prérogatives indispensables à la bonne marche de notre société (dont je tais un qualificatif).

La sensation est un monde très vaste, presque aussi vaste que le monde et c’est beaucoup pour un stressé, tout rétréci qu’il est. Sentir le monde avec ses sens, son odeur, ses sons, ses couleurs, ses vibrations, son poids, son « ozone », etc., c’est beaucoup pour un stressé... il trouve toujours autre chose à faire... dont le résultat est fréquemment de détruire la quiétude du monde. C’est un choix qu’il opère chaque jour... Un jour, il y avait à la même époque, deux moyens d’utiliser l’expansion d’un gaz dans un cylindre : un à combustion externe et l’autre à combustion interne, à *explosion*... Bien que le premier soit bien plus efficace et moins destructeur, c’est le second que le stressé a choisi (il *explose*) et notre air est depuis empuanti par les gaz d’échappements, nos poumons pourris par les hydrocarbures aromatiques et notre sang imbibé de perturbateurs endocriniens volatiles ; on entend le bruit de ces explosions sans cesse, sans fin, en tout temps et en tout endroit, souvent aidés par des klaxons, des sirènes, d’impérieux hululements sur deux tons impétueux. Pour le stressé, il ne pouvait en être autrement. Et ceci est un exemple. L’industrie nucléaire entretient ce stress, 24/24 et 365/365 pour des millénaires... il est content ! L’industrie pharmaceutique, agricole, le monde de la médecine, la chimie, le pétrole, le béton et le sable, l'omniprésence de la musique amplifiée, les salles d’accouchement, et j’en passe. Le stressé détruit le monde (veni, vidi, destrui) et il dit le reconstruire... à son image qu’il décrit comme humaine. Ce sont les vainqueurs qui donnent leur *sens* aux mots. Et nos enfants y naissent, y baignent, en sont nourri pour y croître.






mercredi 21 août 2019

Tortionnaire et victime

Dans cette société, les gens s’identifient toujours au tortionnaire, jamais à la victime ; ou quand c’est à la victime, c’est pour pleurer sur son sort, sans jamais toucher efficacement au tortionnaire... car une telle efficacité est une (LA !) révolution... qui ne sera qu’éphémère pour retomber dans le même travers. La victime se transforme même en tortionnaire car elle incommode ce dernier dans ses œuvres qui consistent à fabriquer une victime. Ainsi, si le tortionnaire est si bien protégé, c’est parce qu’il fait une victime et que le point central affectif de tout ceci, c’est d’en faire une de plus, aux yeux de tous qui le déplorent, mais l'acceptent.

C’est si connu que cela est inscrit dans les annales humaines : on va accuser la victime de l’être, on va la soupçonner d’avoir désiré l’être, la conspuer de l’être devenue et lui poser la question du pourquoi elle n’est pas encore disparue, ou pourquoi elle n’a pas encore pardonné à son tortionnaire. Pour n’importe quelle raison, il faut qu’une personne souffre pour devenir cette victime qui souffre, selon cet étrange amour pour cette caractéristique. D’ailleurs, on ne parle habituellement pas de « tortionnaire » (d’une personne qui torture sans autre but que de torturer, fut-ce pour raison sociale) mais de « bourreau » (une personne qui tue en réponse à une sanction sociale, fut-elle auto-proclamée), une sorte d’implacable résumé d’un inéducable nécessaire.

Il ne s’agit pas d’une personnalité stable, car chacun, à tour de rôle, est ou tortionnaire ou victime. Parfois un couple de personnes sera suffisant : l’être *humain* frustré d’amour adopte, après y avoir été noyé dès le plus jeune âge, cette manière de relation sociale, affective et sexuelle en fonction d’un contexte dans lequel il guettera, attentif aux moindres variations de l’imminence d’un pouvoir sur autrui (et seulement dans ce seul but de garder la tête hors de l’eau), l’instant possible de devenir enfin tortionnaire. Qu’importe que cet environnement se dégrade, l’important est de devenir tortionnaire, et si la déprédation de l’environnement géographique s’y ajoute, le contentement sera d’autant plus jouissif  : autrui sera dans la merde jusqu’au nez, au lieu du niveau du cou.

Cependant, la victime cherchera et trouvera un moyen de « se venger », insidieusement, du tortionnaire (ou de celui qu’elle considère comme tel), en devenant à sa manière fadasse, un tortionnaire sur un autre... « plus faible... affectivement ». Elle réussira à vous pourrir la vie, par un petit détail insignifiant qui pourrira votre ouvrage. La victime devenue tortionnaire ne veut pas que vous soyez heureux, que vous ressentiez de la joie sans contrepartie, que le contentement fasse soulever de plaisir les commissures de vos lèvres et étrécir les rides du coin de vos yeux qui voudraient librement briller comme des étoiles. Elle et il haïssent cela.

Le pouvoir d’un tortionnaire ne se mesure pas au nombre de ses victimes, mais à sa puissance, la puissance de sa malfaisance, de sa malveillance, de la maturité de son désir de nuire à autrui. Le pouvoir est essentiellement délégué à des sous-tortionnaires qui se chargent des basses-œuvres que leur indique le puissant à leur regard ternis du désir d’agir en vertu de ce pouvoir nuire à eux délégué. Ce pouvoir est en somme *coopté par hiérarchie*, hiérarchiquement dégoulinant du haut vers le bas et c’est la puissance de ses agissements qui remonte en sanie au suprême. Chacun s’appuie sur le grade supérieur ou inférieur pour légitimer ses actes de tortionnaire : l’inférieur attend l’approbation du supérieur, et le supérieur voit cette approbation chez l’inférieur qui agit par et pour lui. Comme l'inférieur, le supérieur ne peut qu’être méchant, non pas pour des rasions opposées, mais par cooptation des pouvoirs dont ils se réjouissent de la puissance de la sommité. Car l’inférieur retourne contre « plus inférieur que d’autres », la brimade de son sort et le supérieur qui est « plus égal que d’autres » vomira la bile dont il doit inonder ses inférieurs. Ils sont conscients l’un l’autre, de former une famille dont l’intérêt est de perdurer, comme ils souffrent, la souffrance d’autrui.

Le jeu du tortionnaire, et celui qui consiste pour la victime à trouver vengeance, sont si intimement liés qu’en distinguer un « légitime » d’un « illégitime » est une torture dont on se ferait facilement la victime : il est impossible, généralement, de pouvoir prendre un parti, car la succession des affres étant une suite de réponses aussi douloureuses que celles de la question qu’on a subie, que de dissoudre l’acte qu’on a sous les yeux est inutile : il se reconstituera immédiatement, dans la seconde qui suit cette prise de position. En fait, il ne s’agit pas d’un jeu destiné à une fin, mais d’une fin qui n’est qu’un jeu, sans cesse remise sur l’établi pour y recevoir le coup de pique qui la régénèrera.

Mais je suis méchant, moi-même, dans ce discours. Dans la majorité des cas, la malveillance est causée par l’ignorance des conséquences globales issues de nos actes. On ignore le résultat, les effets, de nos agissements, à ceci que si elle ne peut rester sans conséquences, cette ignorance-même est une malveillance, après coup. La malversation due à l’ignorance ou à la malveillance ont les mêmes résultats : ici rien n’en est su, là, on le sait. Puis-je en vouloir à l’ignorance ? Oui, bien sûr, car l’humain est tel que l’ignorance est le fruit de notre paresse affective... de même que c’est cette paresse affective qui vous permet d’être malveillant. Mais, il y a là une *intention* qu’il n’y a pas ici. J’éprouverai cependant un grand plaisir à constater que je ne suis ni victime ni tortionnaire en vérifiant que mes agissements sont sans danger pour autrui, par acquis de conscience ou par expérience, aussi bien. La satisfaction de l’assurance de ne pas faire de victime est un gage de n’être pas non plus tortionnaire !

Ne vouloir être ni l’un (tortionnaire) ni l’autre (victime) vous pose dans une bulle particulière : vous êtes aux yeux de tous, fou, car personne ne peut le comprendre, et nul ne peut vous comprendre. « Quoi ? Vous n’avez pas de désir de vengeance ? pas de rancœur dissimulée qui demande à vomir ? Quoi ? Vous êtes exempt du désir du vouloir inférioriser autrui ? de ne manifester aucun pouvoir sur lui ou sur elle ? ». Et pour autant, on vous met en devoir de prendre parti pour le tortionnaire (l’oppresseur) ou la victime (l’oppressé) alors que ces deux *trucs* forment un couple dont les victimes-même iront s’identifier à ce tortionnaire, jalousant son pouvoir de malveillance ; ou à un tortionnaire, l’empathie anesthésiée autant qu’est asthéniée sa sensation de la répétition, heureux de faire souffrir sans souffrir immédiatement lui-même. Mais, soit directement, soit indirectement, ils vous impliquent dans leurs magouilles, car si vous n’êtes pas tortionnaire, vous ne vous sentez pas non plus être fait pour souffrir, et ces deux *trucs* ne se privent pas de vous confronter l’une ou l’autre face à cette carence, de vous le faire ressentir pour pourrir votre vie pourtant à usage unique.

mardi 30 juillet 2019

L’enfer du paradis

Le maitre-ouvrage de l'humain caractériellement cuirassé consiste à faire du paradis (la planète sur laquelle il pose ses pieds et son dos) un enfer.

Le paradis ce n'est pas ce petit bout d’espace de rien du tout nommé « Éden » mystérieusement placé quelque part sur la planète, non : le paradis c'est tout le reste et l’éden était cet enfer, avec son fatidique Arbre de la Connaissance inventé par Dieu qui a vomi sur l’ensemble du monde.

Depuis le début de son « humanité », l’humain est seul responsable de ses actes... et lui seul l’est, comme tous les animaux. Un jour, il a eu peur des conséquences de ses actes, et pour se décharger de ses responsabilités, il a inventé Dieu. Comme Dieu, l’humain est un lâche. Tant que les dieux ont correspondu à une *sensation* du monde, l’humain s’attribuait encore la responsabilité de ses actes ; dès lors que l’humain a inventé un dieu *autonome*, il s’est déchargé sur Lui de ses responsabilités, car il a perdu, cuirassé, la capacité d’assumer la responsabilité de ce qu’il fait.

Que l’humain cuirassé veuille transformer – ou transforme – son paradis en enfer n'est pas véritablement conscient, mais cette parcelle d’inconscience est sans doute la clé du problème. Les gens ne sont pas volontairement malveillants, mais ils le sont inconsciemment, sans en avoir conscience. Cette *ignorance* est l’expression de cette inconscience des conséquences de leurs actes, ou de l’impuissance à y remédier. La béance de cette inconscience (qui est le filtre psychique qui les *aveugle* (ils sont psychiquement et amoureusement aveuglés par cette ignorance), qui leur obstrue l’entendement, est cette absence de sa propre « connaissance » (pas la reconnaissance de la copulation, mais la connaissance de l’orgasme).

En ayant interdit à l’humain l’accès à l’Arbre de la Connaissance (l'orgasme et sa transe : les humains se sont « connus »), Dieu (l’irresponsabilité de l’humain cuirassé) a transformé le monde en enfer... Il le dit lui-même : « Femme, tu enfanteras dans la douleur » et « Homme, tu travailleras ».

Si Dieu existe, son procès est indispensable et il y sera condamné à vivre la condition d'humain. Il a tenté de s’absoudre de Son péché, dit-on, à travers le Christ... mais ce n’était pas Dieu lui-même, plutôt un subterfuge malheureux : il n’est *pas* passé en procès. Le procès du Christ est une cruelle farfeluterie, une foutaise de parodie du procès de l’ignorance humaine devant la responsabilité de son inertie sur le monde.

Le message du Christ omettait cette « connaissance » et l’incommensurable peur présente chez l’humain d’y accéder sereinement. Le paradis était déjà devenu un enfer, une poubelle de pourriture affective, sexuelle, sociale, environnementale.... parce que l’humain s’était, selon un Dieu jaloux de la femme, « connu », parce que l’humain avait pris connaissance de la puissance de l’orgasme et de sa transe, qu’Il jalousait. Dieu est jaloux de la beauté et de la puissance de la femme, car il ne peut y accéder ! Quand il « connait » la femme, c’est pour s’imposer à elle (parfois même sans copulation), et lui donner la charge de la gestation de son rêve avorté de sauver le monde.

Qui est alors ce Dieu ? C’est précisément cette inconscience dont je parlais plus haut, cette ignorance, dynamisées par la peur de l’orgasme et de sa transe. La haine de la Vie, c’est Dieu. Si tant de gens « croient » en Dieu, c’est qu’ils y reconnaissent leur propre haine de la Vie, que je résume par la haine de l’orgasme et de la transe amoureuse. Dieu est l’exacte mesure de l’inertie caractérielle des masses, de l’enfer dans lequel elles végètent et des éventuelles possibilités qu’elles auraient de pouvoir s’en sortir.

vendredi 12 avril 2019

Anniversaire

C'est mon anniversaire aujourd’hui. Alors je me suis fait un petit cadeau.

On dit qu’il y a deux formes de pensées :
- la pensée séquentielle qui est la plus commune (environ 95% des gens à dose plus ou moins forte : jusqu’au QI 125 en gros). Cette pensée marche par séquences qui se succèdent les unes aux autres, non pas par saut qualitatif, mais par excès quantitatif, en sorte que la pensée déjà grosse engendre celle qui vient, les unes poussant une nouvelle.
- la pensée arborescente : la pensée qui marche par plusieurs pensées simultanées qui choisit, dit-on, la plus opportune du moment (QI supérieur à 125 et test de Raven supérieur à 52).

Mon cadeau est que j’y ajoute deux autres pensées :
- la pensée associative : elle fonctionne par succession ininterrompue de pensées qui se suivent les unes les autres, sans discontinuer ;
- et la pensée d’image : cette pensée n’utilise rien d’autre que les images pour émerger à la conscience : genre, le rêve.

Mais alors quoi ?

Hébé : la pensée par images est la pensée reptilienne ; la pensée associative est limbique ; les deux autres pensées sont de l’ordre du néocortex.

On comprend alors
- pourquoi les gens ont tant besoin d’IMAGES, que les gens soient subjugués par les images ;
- que le chant des oiseaux est de l’ordre du limbique : pensée continue adhérente au TEMPS qui passe, comme les discours des politiques, absorbés par des histoires ;
- et la pensée « rationnelle », la pensée séquentielle qui assure à l’humain son adaptation technique au monde, sans une véritable discrimination, sinon que logique, du bien et du mal ;
- tandis que la pensée arborescente lui donne la liberté de penser le monde, de se dissocier du monde par un regard à facettes multiples plus ou moins cohérent.

Tout le monde est doté, à des doses différentes, de toutes les pensées qui lui permettent de vivre, c’est-à-dire, de s’adapter au monde, comme la très grande généralité des autres animaux. Les autres animaux sont obligatoirement dotés de la pensée reptilienne et de la pensée associative, tous. De plus, chaque animal est doté de la pensée séquentielle à des doses plus ou moins fortes, et plus précautionneusement de la pensée arborescente. Il semblerait que cette dernière pensée soit plus importance chez nous, animaux humains, et, sans doute par manque brutal de poésie, on se pose encore la question : à quoi cela peut-il bien nous servir ? Cela, bien évidemment, nous sert à jouir socialement de la vie.

À ceci près que chaque mode de penser est intimement lié à l’expérience du penseur, celle que chacun de nous avons vécu et vivons, c’est à dire, à l’adaptation psycho-affective liée à notre vécu dans un monde où nous avons cherché à nous adapter au moindre déplaisir. Car la pensée utilise un *moyen* – la logique – pour se déployer et cette logique est absolument dépendante de la structure caractérielle (musculo-psychique) du penseur. Un paranoïaque ne pense pas comme un hébéphrène et aucun des deux ne comprend l’humour (ni la liberté de vécu) d’une personne sexuellement mature.

Cette « logique » en tant que moyen, a plusieurs outils ou modalités (comme le charpentier a une scie, un marteau, un fil à plomb, un fil à tracer, un crayon, l’équerre, la sauterelle, etc.). Cette « logique » permet au penseur de « comprendre » le monde à travers le filtre des quatre pensées : reptilienne (images), limbique (associative), néocorticale (d’abord séquentielle, et ensuite arborescente).

Au surplus, la pensée arborescente utilise davantage les modalités de la logique en ce sens où elle n’a pas véritablement de logique sinon qu’elle-même. La structure caractérielle (la structure musculo-psychique résultant de notre adaptation au plaisir et au déplaisir du monde) exige, pour cohérence, un ordonnancement des résultats de cette pensée, car la pensée est d’abord une communication, un facteur de socialité (je parle d’un outil de grégarité) et elle doit être DITE, sinon elle pourrit et rend malade. L’apprentissage de l’enfance qui forme cette structure caractérielle mène précisément au résultat de ce qui a été pourri, ou composté, ou est encore resté vivant. La « maladie mentale » est un pourrissement excessif des pensées inexprimées sans compostage, et principalement d’origine sexuelle, du désir d’aller vers l’autre. Si l’humain sait si mal gérer ses déchets (jusqu’à en créer par obstination), c’est simplement parce qu’il n’a pas eu la possibilité d’organiser ses pensées-déchets et qu’il a dû les oublier, les laisser pourrir.

Ainsi, quelque soit son « QI », n’importe quelle personne peut ne pas être malveillante à l’égard de son prochain, parce qu’elle retire du plaisir à vivre avec elle ; sinon, l’ensemble de la pensée séquentielle s’orientera vers la malversation et les bribes de pensées arborescentes viendront s’agglomérer cette logique pour en parfaire l’imbécillité. La structure caractérielle rigidifiée annihile la bienveillance dès lors qu’elle perçoit la liberté de se mouvoir fleurir autour d’elle.

D’autre part, la pensée, quelque soit sa nature, est un jaillissement. L’ordre préétabli auquel doit s’adapter chacun de nous, a pour but, aujourd’hui, d’empêcher ce jaillissement (pour tourner nos affections vers la plus-value).

La poésie est le mode de pensée qui corrobore les quatre pensées pour les faire jaillir en un éclair fulgurant. L’amour sexuel satisfaisant, l’orgasme, est la perte des quatre pensées en une seule, en un éclair fulgurant : l’image et son identification, le temps et son attention, le rythme et son harmonie, l’amour communié.

Alors quid de l’intelligence. Certainement pas wikipédia. L’intelligence est l’art de la combinaison, de choisir dans des éléments épars, une cohérence. L’intelligence c’est trouver le meilleur, même dans le pire. La pensée séquentielle donnera à ce résultat une forme technique, la pensée arborescente une forme poétique (j’ai lu « créative »). Et quand l’intelligence est l’ordonnancement, la logique est la forme de l’ordonnancement. Le choix de la cohérence est, à nouveau, intimement lié au vécu, à la structure caractérielle. Sans compter que l’expression de cette pensée qui doit être dite doit elle aussi correspondre au moment social, je veux dire, en vertu et en fonction du moment social dont elle est issue.

C’est pour cela qu’avec un test de Raven de 53 et un QI de 125, je ne suis plus séquentiel et pas encore arborescent ! Je comprends la difficulté d’adaptation.

Allez : bises tout plein et plein de joie !

dimanche 24 mars 2019

Supercherie du patriarcat

Tu te dis intéressée par mes recherches (que j’arrête d’ailleurs, car elles me dissocient douloureusement de la société : je me retrouve seul, de manière angoissante, car pour y vivre, il faut avoir une sexualité relativement – selon chacun – débile, sinon elle est invivable, mortellement invivable). Ainsi, je comprends que tu puisses penser que je puise outrepasser une simple relation, disons... d’attraction intellectuelle.

Toute mon activité sociale (mon « travail ») a tourné autour de la question de la satisfaction sexuelle, c’est-à-dire aujourd’hui, à l’insatisfaction sexuelle. La satisfaction est un phénomène *social*, où y aboutit l’affectivité particulière. Ce monde est tel qu’il se présente à nos yeux (avec ses pollutions diverses et variées, sa misère affective, sexuelle et intellectuel, et ses pauvres) car il fuit comme la peste la satisfaction sexuelle. Il ne peut faire autrement ! Il en ignore la matière, la manière et craint à l’extrême d’y aborder, car alors il et elle subiraient une telle déstructuration caractérielle qu’il et elle en mourraient. Dans la société patriarcale, les femmes craignent leur désir, car il est *social*.

L’orgasme selon Wilhelm Reich est impossible dans notre société patriarcale, dans cette société capitaliste qui cache derrière son petit doigt le patriarcat *en mouvement*. Rien que d’affirmer cela m’extrait de toute socialité possible ! Quand les gens partagent un orgasme, il s’agit d’environ 4 % de la population, à peine, ils le dissimulent, alors qu’il s’agit là de socialité. Chez les peuples qui ne craignent pas l’orgasme (généralement les société à filiation matrilinéaire dont il reste si peu, « détruite par l’agressivité du patriarcat » – Michel Odent), on parle, on discute, on évalue, on pèse l’amour incarné. On ne sépare pas le « corps » en « esprit » et « chair », car le plaisir est incarné et source d’une grande satisfaction à vivre, où l’esprit est le support des mots. Ici, aujourd’hui, on évoque de loin ce qu’on n’atteint pas avec un demi-sourire et une demi-grimace. On a peur !

Mais, comme dit Karl Marx, une activité n’est sociale que lorsqu’elle elle est *partagée* (lui, il dit « échangée », mais c’est une autre époque). Or, je suis seul : personne ne veut partager ce sujet avec moi, personne. Même le milieu « reichien » ne comprend pas ma ténacité à vouloir dissoudre ce satané (je pose le mot) patriarcat, source de tant de malheur, d’insatisfaction, de bêtise, de maltraitance, de pollutions... ne serait-ce que par une théorie !

Du dernier texte « Aphrodisie » que j’ai écrit (il y en a eu un autre depuis : « Du rôle du travail dans la transformation de l’humain en homoncule »), personne n’a saisi l’aspect révolutionnaire, je veux dire *déculpabilisant* vis-à-vis de nos propres sensations de plaisir, inhibées par la morale du patriarcat. Ou bien si cela a été véritablement perçu, persiste une telle honte à évoquer le sujet, qu’on n’y investira aucun « partage », ni de suite. Alors que mon but est de précisément fondre cette honte. Guy Debord affirme : On se bat pour une cause perdue d’avance. Aujourd’hui, il y a un grand refus de l’usage de la sexuation, c’est-à-dire, de la rencontre, du phénomène social de la rencontre par celle du mélange des sexes : « J’ai envie de me confondre en toi » ou bien « Je veux me pénétrer de toi » (qui est l’absolu de l’inter-sexe), n’ont plus de formulation possible.

On nage dans le patriarcat et sortir la tête de l’eau donne la sensation de mourir. Chacun a sa petite marotte contre lui : qui la bouffe ingrate qu’il vous donne à manger ; qui l’air pourri qu’il donne à respirer à nos enfants ; qui l’exploitation de « l’homme par l’homme » ; qui la maladie du profit, etc. mais personne ne veut se pencher sur l’origine de cette faiblesse : *la peur de l’orgasme qui vous demande impérativement la présence d’un chef pour vous rassurer de ne l’atteindre pas*. On critiquera même le chef, mais on sera encore plus vicieux que lui pour soudoyer votre bonne santé quand vous critiquez la nature de son amour.

C’est un cercle vicieux : comme vous avez peur du plaisir sexué naturel, vous avez besoin d’un chef pour vous en protéger ; et tant que vous aurez envie d’être sous la protection d’un chef, vous ne serez jamais suffisamment *mature* pour atteindre ce dont vous languissez en le regardant de loin. Tout cela je l’ai décortiqué, et ça n’intéresse personne. CQFD !

Et oui, mais... je suis seul, complètement désocialisé. Et point de retour en arrière possible, à moins de drogues dures (médicaments) ou de lobotomie. Mais je ne suis pas seul dans cette situation : d’après les statistiques nationales, nous sommes près de six millions dans cet état, certes pas pour les mêmes raisons que les miennes, mais...

Puisque chacun y trouve avec l’incarnation du plaisir son chemin, il n’y a *aucun* ostracisme dans une société à filiation matrilinéaire. Les seuls suicides relèvent de l’amour entre frère et sœur et ils se meurent tous les deux, ensemble, main dans la main. Immense altération de la haute capacité grégaire de l’être humain, l’ostracisme relève donc de la société patriarcale. Pour le patriarcat, la sexualité est le mal, alors qu’elle est le facteur essentiellement positif à la vie en troupeau ! Non pas du lupanar, mais de la capacité à se donner à autrui en toute liberté incarnée, partagée et complice.

Tout cela du fait que je me demande pourquoi tu recules sans cesse un éventuel rendez-vous. Aurais-je des questions à te poser en tant que femme ? Avec le temps, j’atteints souvent des réponses à mes questions et le temps encore confirme ou infirme la validité de mes réponses. Il y a que ces questions sont autant de facteurs de socialité ! Mes réponses, en fait, arriveront, mais quid quand je reste seul ? J’en fait des cauchemars de la solitude. La différence est que les réponses discutées utilisent des mots communs, tandis que mes réponses n’ont que l’imperfection de mes mots.

Encore qu’il y a l’abrupte réalité : si mon « travail » n’intéresse personne, c’est parce qu’il ne peut être accueilli de ceux que cela devrait intéresser, et de ceux qui n’en ont pas besoin, ma formulation est boiteuse... il doit contenir quelque vice caché avec lequel ils ne veulent rien avoir affaire. Seul !

C’est terrifiant la solitude. À tel point qu’on affirmera que je ne cherche son antidote, la complicité, qu’à cause de ma solitude... pour me faire atteindre le même résultat : seul. On ira à dire que je colle les filles par compensation de cette solitude. Ce monde est à pleurer. La solitude est une *maladie sociale*, ce n’est pas une maladie personnelle. La solitude dénonce l’incapacité de la société à se mouvoir dans ses mouvances, à accepter l’altérité qui ne se manifeste que parce qu’elle ne permet pas de s’épanouir en son sein et parce qu’elle ne donne pas de satisfaction sinon que déplorable, mesquine et délictueuse.

La solitude c’est terrifiant. On sait que l’intensité du trauma est en grande partie relatif à la longueur du *moment de solitude* qui suit ce traumatisme. Imaginons une solitude qui dure des jours et des jours, des mois, seul, sans altérité, sans la complicité du partage ou le partage d’une complicité !

Mais quoi ? J’ai une aura qui pose bien des problèmes : elle attire et révulse à la fois. Certains regards me font dire que je pue le mâle, mais pas celui gentil, avenant, mais celui qui perce. Des personnes hésitent même à me toucher, tant la charge que je contiens leur est peu tolérable. Je leur fais pensé à la sexualité brutale qui n’existe que dans leur tête, puisque pour pratiquer une telle sexualité il faut être psychotique. Suis-je ou ne suis-je pas psychotique ? Non, ce sont les temps qui veulent cela. Je me suis orienté vers la satisfaction, je l’aborde, j’en déborde, et les gens y voient leur noyade. J’ai vu deux fois des jeunes filles faire un écart sur le trottoir, alors que je les croisais ! Quelle souffrance ne doivent-elles pas vivre pour se comporter ainsi...

C’est que les gens ne peuvent pas ou plus avoir (et n’ont-ils jamais pu, à moins d’une étourderie ou d’une confiance immodérée de ma part) sur cette manifestation de la vie, un *pouvoir* qui les en protège, c’est-à-dire qui les protègent de ce qu’ils évitent, cette satisfaction, car ils ne sont plus à même, rigidifiés par la morale du patriarcat,  d’y accéder et cherchent alors à prendre sur moi ce pouvoir qui va les rassurer. Oui, on peut penser que c’est une affabulation de ma part, mais c’est aussi le résultat de ma vie. Et on use pour prendre le pouvoir sur cette vitalité, des pires insanités. Les prises de pouvoir sur la vie saine ou qui le parait, sont intraitables, iniques et violentes, et tout cela pour l’a détruire ou en amoindrir la force. Le « sujet » de la sexualité est aussi brûlant que l’enfer. Et c’est l’enfer sexuel fait de la vie un enfer.

Mais je ne peux pas non plus ne pas me reprocher de ne m’être pas adapté à la société patriarcale. C’est qu’il s’agit d’un projet de très très longue date, peut-être dès l’âge de six ou huit ans, peut-être même avant, vers les trois ans où je situe ma première solitude, a « réalisé un destin ». Et comme projet *abouti* de vie, que ne devrais-je « castrer » comme le dit Dolto, pour une adaptation convenable ? Comment penser qu’il y a une inadaptation à la vie que de lui demander la satisfaction aphrodisiaque qu’elle a créé à l’effet de la satisfaction de vivre ? Ça ne sert à rien de vivre *sans correspondance* au monde humain ou avec le monde humain, et oui, sinon on va à la mort, car chez cet humain, animal grégaire par excellence, la mort sociale est la mort physique. Il est donc inévitable que je doive prendre mon état de solitude, au surplus, comme une maladie personnelle... à laquelle je ne sais quelle cure adopter puisque pour qu’elle se dissolve dans le temps, il est besoin d’une rencontre amoureuse. J’ai bien évidemment mes travers. Héraclite disait : Qu’importe pour d’avoir un seul ami si c’est le meilleur.

Le refus obstiné du plaisir aphrodisiaque se situe exactement dans l’asthénie des organes qui lui sont destinés – destinés au plaisir, s’ils étaient excitables, ils seraient excités. Cette asthénie peut, certes, provenir de l’éducation appuyée sur la morale patriarcale de sorte qu’elle reste encore dans l’anomie... ou l’anonymat. Mais c’est véritablement un manque de courage que de pas se destiner à redonner la vie à la vie vivante, pulsatile, puissante... sans pour autant blâmer ce manque de courage, car rejoindre ces sensations, revient à se séparer du présent troupeau et de ses convenances, de ses règles, de son pouvoir organique : le troupeau est indispensable à l’humain. Il possède une large panoplie de dénégations, de punitions, de malversations, d’acrimonies, d’insultes pour qui s’écarte du troupeau. Le troupeau, c’est LA société. Pourtant, si l’humain est un animal ô combien grégaire, il doit exister les *outils* qui permettent la vie *intégrée* à cette grégarité : l’amour, la sexuation, l’amitié, la collaboration, la participation, l’empathie, la coparticipation, l’entraide, la sympathie, la bienveillance, et j’en passe. Qu’en est-il ? Que sont devenues toutes ces aptitudes *innées* rabotées par la mesquinerie du patriarcat, où se sont évanouis tous ces rêves d’harmonie ? Pour cet « actuel » animal grégaire, le troupeau n’existe pas, puisqu’il veut ignorer l’implication d’une telle découverte et baliser de la malveillance qu’il assène, jour et nuit, les attributions rendues chétives et chérubinesques de son genre, pour les contenir dans leur immaturité. Cela souligne l’ignominie dans laquelle il végète avec sa compétition, son « espoir de gain », sa *plus-value*, ses chefs, sbires et larbins, ses meurtres « d’amour », son insalubrité, sa pollution, sa misère affective, sociale, sexuelle, son inconscience, son irresponsabilité. Le troupeau actuel est comblé d’individualistes insatisfaits qui se retrouvent dans le narcissisme de l’objet, minéralisation de leur « personnalité ». Ce n’est plus autrui, c’est l’objet, quitte à prendre autrui pour un objet caillouteux. Cela lui permet, à elle comme à lui, de ne pas se regarder, de ne pas *toucher* à les réveiller, les organes aphrodisiaques.

Tu vois que je suis le découvreur de deux thèmes centraux relatifs à notre genre. Quand Freud a découvert *l’inconscient* et l’a clarifié, Wilhelm Reich *la cuirasse caractérielle* et l’a décrite (il a aussi découvert l’énergie de la vie), j’ai découvert que l’humain est un animal grégaire et ai explicité cet aspect crucial de notre genre, ainsi que ces organes qu’il appelle « génitaux » sont des organes *aphrodisiaques* et j’ai démontré cette supercherie du patriarcat. Cela n’intéresse personne. Et pour cause !

Cependant, l’absence d’excitation du caractère grégaire de l’être humain – la solitude, ou plutôt l’absence de complicité du partage et du partage d’une complicité – amène soit à la résignation, soit à l’auto-mutilation, soit à la tristesse. Chez moi, c’est une immense tristesse, car je ne sais pas me résigner et crains la douleur du corps. Cette tristesse me bouffe tout et je suis seul à l’assumer.

Porte-toi bien et que le Céleste Couple Divin qui donne ses couleurs chaudes au soir et fait frémir la perle de rosée sur le brin d’herbe – assiette du monde vivant – au petit matin alors que disparaît sous la clarté solaire la pâleur de la lune, te couvre les épaules de sa bienheureuse et bienveillante bénédiction !