jeudi 22 août 2019

Sensation et bonheur

Sincèrement, avec tous ses tracas particuliers, la vie vaut le coup d’être vécue, mais pas dans ce monde humain de merde.

La sensation de vivre est *extraordinaire* et c’est amusant parce qu’elle est sa propre source : la vie *est* la sensation. Qui s’y intéresse ? Quasiment tous les animaux et insectes, etc. sont centrés sur cette auto-sensation : ils ne perçoivent la sensation que parce qu’ils la vivent, c’est évident. Nous ? Serait-ce suffisant de dire que nous percevons sentir ? Je ne sais...

En fait, le « bonheur » fait parti intégrante de l’existence, puisqu’il ressemble si fortement à cette sensation de vivre... et donc, à la satisfaction à la fois de vivre et de sentir, tout simplement. Ce « bonheur » doit être universel... sauf chez l’humain qui en fait une tarte à la crème.

La sensation est aussi bien la satisfaction de sentir que la sensation elle-même... à moins de douleur... encore qu’on *sent* encore et toujours. La mort est la fin de toute sensation par l’organisme vivant. Et la sensation n’est pas que de nerf ! elle est surtout d’émotion d’humeur, de liquide, de fluide. La spécificité de la mort donne une réellement bonne approche de la sensation, par absente *totale* : ainsi je peux dire que la sensation est la vie, sa présence, et sa reconnaissance.

Il est possible que c’est à cause de cette duplicité de la sensation qui se sent elle-même, qu’a octroyé la « réflexion » des anthropoïdes, mais à tel point de développer un néocortex... ça je ne sais pas (encore). Dans quelle mesure la sensation aurait-elle eu besoin d’un tel développement dans sa reconnaissance qu’elle invente les anthropoïdes ? On peut surtout poser la question à l’envers : quelle est cette puissance dans sa perception que la sensation chez l’humain en arrive à l’effrayer ? Surtout les sensations aphrodisiaques, issues des organes aphrodisiaques (qu’ils nomment génitaux, pour s’en séparer davantage) : le rejet de la plénitude de ces sensations spécifiques a débordé sur l’ensemble de l’existence humaine jusqu’à la pourrir à la moelle et pourrir le monde dans lequel il vit, jusqu’à la moelle, aussi bien.... sans vouloir le reconnaitre ! ... c’est-à-dire : le sentir, le ressentir...

Sans l’éclat de la lumière de la sensation, rien n’est possible. Et pourtant, nous avons tous les outils pour sentir, plus ou moins asthéniés, plutôt. Un sens engourdi ne sent pas comme un sens vif, attentif, aimant, accueillant, curieux. Au surplus, il y a une anesthésie de la sensation dans la répétition et le sens ad hoc qui consiste précisément à rafraîchir cette anesthésie, en arrive à s’oublier pour rafraîchir cette sensation : l’asthénie du *sens de la répétition* est sans doute le plus grave avatar de l’humain qui dénonce qu’il a sombré dans la résignation.

La sensation s’apparente au mystère de la poésie : quelque chose se passe, qui vous emporte quelque part, en un lieu à l’image magique, imagique. Le poète sait transmettre ce quelque chose, le lecteur aux sens éveillés la perce-voit et en jouit. La poésie est une tension qui se détend d’elle-même dans la beauté, non pas seulement de ce qu’elle décrit (et écrit) mais du ressenti qu’elle provoque... et cela mène à une détente de cette tension qu’elle a su susciter en vous. La poésie est une transe, avec sa tension, sa charge, sa décharge et sa détente éphémères.

Mais à l’évocation de cette transe particulière qu’est l’orgasme – cet accès finalement à la détente sexuée – cette détente et sa sensation effraient l’humain (lorsqu’il parle de détente, il n’en a pas accès à la demie, et certains n’en connaissent à peine que le dixième). Néanmoins, pour l’avoir affirmé à l’instant, hors la poésie, la plus grande détente est procurée par l’orgasme... et l’humain a peur de l’orgasme (lorsqu’il parle d’orgasme, il n’en a pas accès à la demie, et certains n’en connaissent à peine que le dixième). La sensation de la détente issu de cette transe (allez savoir pourquoi... on le sait depuis la découverte de la cuirasse caractérielle de Wilhelm Reich, totalement ignorée) est prohibée, vilipendée, torturée, écrasée, souvent détruite par des alarmes stupides et dérisoires destinées à prétexter donner mesure à cet interdit étrange.

Allez savoir pourquoi l’humain reproche à autrui d’être plus détendu que lui, de sorte à le stresser et qu’il le devienne au moins comme lui...? Je donnerai des exemples plus tard qui se pratiquent dès le plus jeune âge ! Et c’est *toujours* le plus stressé qui veut stresser autrui. C’est un fait mal accepté par chacun de nous, mais l’individualisme empêche toute action collective contre cette calamité sociale, affective et sexuelle... et que pourrions-nous faire pour y palier ? Car il s’agit d’une structure (une construction de caractère) de la personnalité du stressé, structure acquise comme protection à un pire, je veux dire, l’adoption d’une attitude du moins pire d’une personne placée face au pire. Et ce « moins pire » est l’assise du stress, ou son équivalent : l’absence de détente satisfaisante. Il semble évident que le stressé hait la détente, non ?

L’anti-poésie, c’est le stress. Le stressé ressent bien son stress, il en perçoit parfaitement la sensation comme étrange (à moins d’un insensibilisation prégnante), mais il ne sait quoi faire, quoi en faire... il est dans l’impossibilité de faire quelque chose contre cette tension continuelle, de sorte à obtenir une détente. C’est qu’il y a placardé une morale qui justifie cette « impossibilité », cette incapacité. Cette morale ôte les moyens ordinaires à la personne de pouvoir prétendre à la détente... et cette morale est partie intégrante de cette structure ! L’exemple le plus criant est d’avoir nommé le nerf qui irrigue les organes aphrodisiaques, le nerf « honteux », le nerf pudendal, alors qu’il est une source de cette transe orgastique que j’évoquais plus haut, même de manière solitaire. C’est la raison pour laquelle j’ai renommé ce nerf, le nerf *aphrodisiaque*.

Le stressé recherche le conflit – une forme active de séparation vis-à-vis d’autrui – comme source de détente ; cependant, sans rechercher concomitamment une réelle solution au conflit, car la permanence du conflit est pour lui une source de moindre stress : en orientant vers autrui sa tension, il la perçoive comme extérieur à lui et s’illusionne s’en défaire. C’est ainsi que le stressé est persuadé que ses organes aphrodisiaques sont absolument cloisonnés à sa seule et unique personne, alors qu’ils sont destinés au partage.

La sensation (le fait de ressentir) lui est une torture, car elle demande son identification, son acceptation et parfois même son acmé. Il confond la provenance de la sensation : de lui ? d’autrui ? et cette indistinction est une grave source de confusion intellectuelle, affective, sociale.

Le stressé ne sait pas respirer sans contrainte – cela lui donne une sensation de fondre qu’il craint comme la noyade ou la chute libre – et faute de pouvoir expirer sans contrainte, la transe orgastique – avec son crescendo d’*emprise de la sensation issue des organes aphrodisiaques sur la conscience* – lui coupe le souffle... il étouffe... il tousse, et il cherche à l’étouffer partout autour de lui. Il ira jusqu’à se créer du pouvoir sur autrui, toujours par la malveillance ou la perversité (faire passer le mal pour du bien), afin de s’assurer que ce crescendo n’aura jamais lieu, sinon que sous une forme pseudonyme, pseudo-orgastique, comme exutoire.

Le stressé, bien malgré lui, vit dans la continuelle *incertitude d’une détente*. Ainsi, quand le stressé parle de « liberté », il reste vague, sinon qu’une insidieuse forme de prison semblable à cet étouffement respiratoire, à cette incertitude de la détente, qui le saisissent dès qu’une émotion devient trop forte : il veut retrouver cette barrière chez chacun de nous, car chez autrui, la liberté lui est intolérable. Quand l’occasion se présente à lui de se secouer du carcan qu’on lui a imposé, il reproduira la même structure sociale, car c’est celle où il trouvera le plus de rassurance. En transition entre ces deux organisations sensiblement identiques, il y aura un flottement, où règnera un désordre qui fera office de moment de liberté où l’emprise qu’il aura sur le fait social n’e pourra pas avoir cours, au soulagement d’autrui. Mais, ce moment est de courte durée : la femme rentrera vite dans les rangs de la hiérarchie, les enfants n’auront qu’à peine goûté aux possibilités que leur offre leur grégarité native (entre-aide, coparticipation, collaboration, empathie et capacité de comprendre des difficultés, pouvoir du dialogue, etc.), et les chefs, un instant égarés, reprendront leurs prérogatives indispensables à la bonne marche de notre société (dont je tais un qualificatif).

La sensation est un monde très vaste, presque aussi vaste que le monde et c’est beaucoup pour un stressé, tout rétréci qu’il est. Sentir le monde avec ses sens, son odeur, ses sons, ses couleurs, ses vibrations, son poids, son « ozone », etc., c’est beaucoup pour un stressé... il trouve toujours autre chose à faire... dont le résultat est fréquemment de détruire la quiétude du monde. C’est un choix qu’il opère chaque jour... Un jour, il y avait à la même époque, deux moyens d’utiliser l’expansion d’un gaz dans un cylindre : un à combustion externe et l’autre à combustion interne, à *explosion*... Bien que le premier soit bien plus efficace et moins destructeur, c’est le second que le stressé a choisi (il *explose*) et notre air est depuis empuanti par les gaz d’échappements, nos poumons pourris par les hydrocarbures aromatiques et notre sang imbibé de perturbateurs endocriniens volatiles ; on entend le bruit de ces explosions sans cesse, sans fin, en tout temps et en tout endroit, souvent aidés par des klaxons, des sirènes, d’impérieux hululements sur deux tons impétueux. Pour le stressé, il ne pouvait en être autrement. Et ceci est un exemple. L’industrie nucléaire entretient ce stress, 24/24 et 365/365 pour des millénaires... il est content ! L’industrie pharmaceutique, agricole, le monde de la médecine, la chimie, le pétrole, le béton et le sable, l'omniprésence de la musique amplifiée, les salles d’accouchement, et j’en passe. Le stressé détruit le monde (veni, vidi, destrui) et il dit le reconstruire... à son image qu’il décrit comme humaine. Ce sont les vainqueurs qui donnent leur *sens* aux mots. Et nos enfants y naissent, y baignent, en sont nourri pour y croître.






mercredi 21 août 2019

Tortionnaire et victime

Dans cette société, les gens s’identifient toujours au tortionnaire, jamais à la victime ; ou quand c’est à la victime, c’est pour pleurer sur son sort, sans jamais toucher efficacement au tortionnaire... car une telle efficacité est une (LA !) révolution... qui ne sera qu’éphémère pour retomber dans le même travers. La victime se transforme même en tortionnaire car elle incommode ce dernier dans ses œuvres qui consistent à fabriquer une victime. Ainsi, si le tortionnaire est si bien protégé, c’est parce qu’il fait une victime et que le point central affectif de tout ceci, c’est d’en faire une de plus, aux yeux de tous qui le déplorent, mais l'acceptent.

C’est si connu que cela est inscrit dans les annales humaines : on va accuser la victime de l’être, on va la soupçonner d’avoir désiré l’être, la conspuer de l’être devenue et lui poser la question du pourquoi elle n’est pas encore disparue, ou pourquoi elle n’a pas encore pardonné à son tortionnaire. Pour n’importe quelle raison, il faut qu’une personne souffre pour devenir cette victime qui souffre, selon cet étrange amour pour cette caractéristique. D’ailleurs, on ne parle habituellement pas de « tortionnaire » (d’une personne qui torture sans autre but que de torturer, fut-ce pour raison sociale) mais de « bourreau » (une personne qui tue en réponse à une sanction sociale, fut-elle auto-proclamée), une sorte d’implacable résumé d’un inéducable nécessaire.

Il ne s’agit pas d’une personnalité stable, car chacun, à tour de rôle, est ou tortionnaire ou victime. Parfois un couple de personnes sera suffisant : l’être *humain* frustré d’amour adopte, après y avoir été noyé dès le plus jeune âge, cette manière de relation sociale, affective et sexuelle en fonction d’un contexte dans lequel il guettera, attentif aux moindres variations de l’imminence d’un pouvoir sur autrui (et seulement dans ce seul but de garder la tête hors de l’eau), l’instant possible de devenir enfin tortionnaire. Qu’importe que cet environnement se dégrade, l’important est de devenir tortionnaire, et si la déprédation de l’environnement géographique s’y ajoute, le contentement sera d’autant plus jouissif  : autrui sera dans la merde jusqu’au nez, au lieu du niveau du cou.

Cependant, la victime cherchera et trouvera un moyen de « se venger », insidieusement, du tortionnaire (ou de celui qu’elle considère comme tel), en devenant à sa manière fadasse, un tortionnaire sur un autre... « plus faible... affectivement ». Elle réussira à vous pourrir la vie, par un petit détail insignifiant qui pourrira votre ouvrage. La victime devenue tortionnaire ne veut pas que vous soyez heureux, que vous ressentiez de la joie sans contrepartie, que le contentement fasse soulever de plaisir les commissures de vos lèvres et étrécir les rides du coin de vos yeux qui voudraient librement briller comme des étoiles. Elle et il haïssent cela.

Le pouvoir d’un tortionnaire ne se mesure pas au nombre de ses victimes, mais à sa puissance, la puissance de sa malfaisance, de sa malveillance, de la maturité de son désir de nuire à autrui. Le pouvoir est essentiellement délégué à des sous-tortionnaires qui se chargent des basses-œuvres que leur indique le puissant à leur regard ternis du désir d’agir en vertu de ce pouvoir nuire à eux délégué. Ce pouvoir est en somme *coopté par hiérarchie*, hiérarchiquement dégoulinant du haut vers le bas et c’est la puissance de ses agissements qui remonte en sanie au suprême. Chacun s’appuie sur le grade supérieur ou inférieur pour légitimer ses actes de tortionnaire : l’inférieur attend l’approbation du supérieur, et le supérieur voit cette approbation chez l’inférieur qui agit par et pour lui. Comme l'inférieur, le supérieur ne peut qu’être méchant, non pas pour des rasions opposées, mais par cooptation des pouvoirs dont ils se réjouissent de la puissance de la sommité. Car l’inférieur retourne contre « plus inférieur que d’autres », la brimade de son sort et le supérieur qui est « plus égal que d’autres » vomira la bile dont il doit inonder ses inférieurs. Ils sont conscients l’un l’autre, de former une famille dont l’intérêt est de perdurer, comme ils souffrent, la souffrance d’autrui.

Le jeu du tortionnaire, et celui qui consiste pour la victime à trouver vengeance, sont si intimement liés qu’en distinguer un « légitime » d’un « illégitime » est une torture dont on se ferait facilement la victime : il est impossible, généralement, de pouvoir prendre un parti, car la succession des affres étant une suite de réponses aussi douloureuses que celles de la question qu’on a subie, que de dissoudre l’acte qu’on a sous les yeux est inutile : il se reconstituera immédiatement, dans la seconde qui suit cette prise de position. En fait, il ne s’agit pas d’un jeu destiné à une fin, mais d’une fin qui n’est qu’un jeu, sans cesse remise sur l’établi pour y recevoir le coup de pique qui la régénèrera.

Mais je suis méchant, moi-même, dans ce discours. Dans la majorité des cas, la malveillance est causée par l’ignorance des conséquences globales issues de nos actes. On ignore le résultat, les effets, de nos agissements, à ceci que si elle ne peut rester sans conséquences, cette ignorance-même est une malveillance, après coup. La malversation due à l’ignorance ou à la malveillance ont les mêmes résultats : ici rien n’en est su, là, on le sait. Puis-je en vouloir à l’ignorance ? Oui, bien sûr, car l’humain est tel que l’ignorance est le fruit de notre paresse affective... de même que c’est cette paresse affective qui vous permet d’être malveillant. Mais, il y a là une *intention* qu’il n’y a pas ici. J’éprouverai cependant un grand plaisir à constater que je ne suis ni victime ni tortionnaire en vérifiant que mes agissements sont sans danger pour autrui, par acquis de conscience ou par expérience, aussi bien. La satisfaction de l’assurance de ne pas faire de victime est un gage de n’être pas non plus tortionnaire !

Ne vouloir être ni l’un (tortionnaire) ni l’autre (victime) vous pose dans une bulle particulière : vous êtes aux yeux de tous, fou, car personne ne peut le comprendre, et nul ne peut vous comprendre. « Quoi ? Vous n’avez pas de désir de vengeance ? pas de rancœur dissimulée qui demande à vomir ? Quoi ? Vous êtes exempt du désir du vouloir inférioriser autrui ? de ne manifester aucun pouvoir sur lui ou sur elle ? ». Et pour autant, on vous met en devoir de prendre parti pour le tortionnaire (l’oppresseur) ou la victime (l’oppressé) alors que ces deux *trucs* forment un couple dont les victimes-même iront s’identifier à ce tortionnaire, jalousant son pouvoir de malveillance ; ou à un tortionnaire, l’empathie anesthésiée autant qu’est asthéniée sa sensation de la répétition, heureux de faire souffrir sans souffrir immédiatement lui-même. Mais, soit directement, soit indirectement, ils vous impliquent dans leurs magouilles, car si vous n’êtes pas tortionnaire, vous ne vous sentez pas non plus être fait pour souffrir, et ces deux *trucs* ne se privent pas de vous confronter l’une ou l’autre face à cette carence, de vous le faire ressentir pour pourrir votre vie pourtant à usage unique.